vendredi 27 janvier 2012

Le dessin à l'honneur!

Deux artistes se distinguent par leurs dessins épatants.

Robbie Cornelissen, exposé au deuxième étage de la Sucrière, réalise des dessins à la mine de plomb mettant en scène une architecture fantasmée. Nous sommes confrontés à un univers urbain imaginaire et oppressant qui est tout entier issu de la subjectivité de l'artiste. Il dit lui-même que ses dessins sortent : "de mon propre esprit, ma propre mémoire et mon propre corps." Il intitule d'ailleurs son oeuvre Capacious memory c'est-à-dire "vaste mémoire". L'artiste rajoute : "Kafka est dans l'air ; ses histoires ont la même intention : celle d'inviter à se perdre dans le labyrinthe de la vie, entre les mondes intérieurs et extérieurs. Nous sommes enfermés. D'un autre côté, la perspective nous invite à entrer dans le dessin : entrez!"


The Capacious memory, 2011

Virginie Chihota est une artiste qui vit et travaille au Zimbabwe. Elle présente une série de dessins, créés spécialement pour la biennale, de petites poupées qui se font ballotter et malmener. C'est touchant et terrible à la fois. Pour elle, la poupée est source d'incapacités : l'incapacité de parler, de réagir, de frapper ou de retourner les coups si nécessaire. Universellement associée aux femmes, la poupée peut être vue comme le symbole de la capitulation, de la soumission - d'une situation sans issue. "Vous pouvez faire subir n'importe quoi à une poupée" explique l'artiste. 





Fruit of the dark womb, 2011.

Deux artistes qui créent leurs propres univers et nous aspirent dedans!

jeudi 26 janvier 2012

Le retour de la peinture...

On dit que la peinture est un genre qui a tendance à disparaître dans les biennales. On privilégie aujourd'hui les performances ou les installations. Les peintures ou les dessins sont moins présents. Heureusement pour nous, Victoria Northoorn aime beaucoup la peinture et s'intéresse particulièrement aux visions du monde que présentent ces artistes peintres.

Lynette Yiadom-Boakye, artiste britannique, présente une série de peintures qu'elle a conçue spécialement pour la biennale. Ses toiles de grand format s'étalent sur le mur de la première salle de la Sucrière. Ce sont principalement des portraits, individuels et collectifs, sur la plage ou autour d'une table. Parfois, ces personnages s'affirment dans des décors incertains, intemporels. Ses traits de pinceaux sont épais, brossant des silhouettes dont le contour n'est pas fini. Marquant!



Marlène Dumas est une artiste sud-africaine qui vit et travaille à Amsterdam. Elle présente des oeuvres à la fois à la Sucrière et au Musée d'art contemporain. Deux portraits sont accrochés au premier étage de la Sucrière. L'expression de la folie a toujours joué un rôle majeur dans l'oeuvre de l'artiste. Obsessive envy créé spécialement pour la biennale reprend La Monomane de l'envie de Géricault conservé au Musée des Beaux-Arts de Lyon. The Producer est un travail qui lui a été inspiré par Phil Spector, un producteur célèbre pour les nombreux titres pop qu'il a produits dans les années soixante et qui a été récemment condamné pour assassinat. Des portraits dérangeants!

La monomane de l'envie, Géricault, tableau conservé au Musée des Beaux-Arts de Lyon

                            The Producer, 2010.                                        Obsessive envy, 2011.

Enfin, Hannah Van Bart est une artiste qui vit et travaille à Amsterdam, elle aussi. Elle présente une série de portraits datant de 2010-2011. Elle explique : "Pour moi, représenter des visages, c'est dépeindre leur être au sein de leur paysage mental. [...] Je travaille jusqu'à ce qu'il y ait quelqu'un, quelqu'un qui se sente chez lui."

Un beau panorama de peintres !

Il neige sur...l'Amérique latine!


Puxador [Pilares], Laura Lima, 1998-2011

Laura Lima est une artiste brésilienne qui travaille à Rio de Janeiro. Elle recrée pour la biennale une oeuvre datant de 1998 qui a été jouée tout le long de l'exposition. Un homme nu tire des liens auxquels il est enchaîné comme s'il essayait de détruire l'architecture de la Sucrière. Les liens sont rattachés aux poteaux soutenant l'architecture et l'homme s'emploie quotidiennement à ébranler l'architecture de cette ancienne usine désaffectée. Ce travail s'inscrit dans un projet au long cours intitulé Men=flesh/ Women=flesh qui place le corps humain au centre de la pratique artistique.

El silencio de las sirenas ( le silence des sirènes), Eduardo Basualdo, 2011

Cet artiste argentin a créé cette oeuvre spécialement pour la biennale de Lyon. Régulièrement, un bassin se remplit d'une eau teintée de rouge. Quelques rochers sont disposés au milieu et il est possible pour les aventuriers de s'installer sur un rocher lors de l'écoulement de l'eau pour y rester lorsque l'eau viendra à nouveau remplir le bassin. Pendant quelques minutes, ces spectateurs audacieux resteront donc coincés sur leur rocher, guettant des sirènes ou des baleines ( il est doux de rêver). Aucune sirène à l'horizon, il n'y a que leur silence à entendre. Cette eau teintée de sang ne serait-elle donc pas un avertissement contre nos activités industrielles qui mettraient en danger la diversité sous-marine? Basualdo s'exprime ainsi sur son oeuvre : 

"Si la Lune s'écrasait contre la Terre, une véritable révolution gagnerait par les mers et les océans du monde. Expression maximale de la subversion des eaux. L'eau avancerait en un mouvement lent et imperceptible jusqu'à tout submerger. Docile sous l'influence des astres, elle cesserait d'être un élément domestiqué pour fixer de nouvelles règles au monde. Le territoire de l'eau concerne ce qui est bas, physique, ce qui est contraire au rationnel. Ici, se manifeste un changement de paradigme : l'ordre de l'esprit succombe sous un nouveau système, dont le centre est le corps tout entier. L'eau, douce, s'impose." 
Une oeuvre qui laisse rêveur ! 
 

mercredi 25 janvier 2012

Il neige sur...Michel Huisman

Cet artiste néerlandais présente trois oeuvres à la biennale, une dans chaque lieu. Ce sont toutes les trois des merveilles. Un univers sombre, ironique mais plein de tendresse s'ouvre à nous. Huisman dit lui-même qu'il est avide d'apprendre chaque jour de nouveau, en tentant de conserver l'état d'esprit qu'il avait à l'âge de sept ans. S'il devait inscrire son travail dans un mouvement d'histoire de l'art, il a longtemps hésité entre pré-apo-romantique ou post-apo-romantique. Il a opté pour apo-romantique.

Voici la première oeuvre présentée au sous-sol de la Sucrière. Elle s'appelle N°84 (document 2000 Hiroshima) et date de 2000. Ce petit animal bouge la tête de temps en temps. Il n'a plus de jambes et ses bras n'ont plus de chair. Le titre parle pour lui-même!

Cette série de charmants oiseaux posés sur des étagères s'intitule N°74 (Surrending Birds) et date de 1999. Malgré le sinistre de la situation, Huisman porte un regard doux sur ces oiseaux fatigués et désespérés.


Cette oeuvre intitulée N°64 (The Secret Garden) et datant de 1990 est un peu spéciale. Le visiteur doit lui-même faire l'expérience du jardin secret en mettant sa tête dans une boîte en carton. Et il y voit un petit oiseau qui chante sur une branche. C'est assez fou et très chouette à expérimenter!


La dernière expérimentation à faire pour le spectateur reste l'oeuvre que l'artiste ( présent sur la photo) a créée pour l'usine de Vaulx-en-Velin. Elle s'intitule N°84 ( Le Poisson) et c'est une création pour la biennale. Nous pouvons donc pénétrer, tel Gepetto, dans le ventre de cet énorme poisson pour vivre en autarcie pendant quelques minutes. Les murs, à l'intérieur, sont tapissés de miroirs et une boule disco pend au plafond. Une radio est allumée diffusant des chansons d'une autre époque. Le mobilier est seulement constitué d'un lit ainsi que d'une table et deux chaises. La radio est disposée sur la table et nous pouvons changer de fréquence si le coeur nous en dit. C'est un véritable univers créé pour survivre en cas de catastrophe écologique ou autre. En sortant, nous sommes rassurés de voir que le monde existe encore dehors !

Michel Huisman est une belle découverte de cette biennale! 

mercredi 11 janvier 2012

Il neige sur la biennale d'art contemporain de Lyon...


Et oui, après la biennale de Venise, je me devais de vous parler de la 11e biennale d'art contemporain de Lyon. Lyon, deuxième ville de France, a toujours été dynamique culturellement et artistiquement. Depuis 1991, date de sa création, la biennale d'art contemporain alterne avec la biennale de la danse créée sept ans plus tôt. Cette métropole est donc toujours animée soit par le défilé inaugural de la biennale de la danse, soit par les oeuvres disposées dans quatre lieux pour la biennale d'art contemporain.

Depuis trois ou quatre éditions en effet, la biennale se déroule dans quatre lieux, ce qui n'est pas toujours très pratique. Cette année, la Sucrière ( ancienne usine désaffectée entièrement refaite ) et le Musée d'art contemporain restent les lieux principaux comme à toutes les biennales depuis quelques années mais se rajoutent la fondation Bullukian ( déjà là depuis la dernière édition) dans le centre de Lyon qui abrite trois artistes et l'usine T.A.S.E ( ancienne usine de textile dans la banlieue lyonnaise), nouveau lieu avec quelques oeuvres. Cet éparpillement ne facilite pas la lecture de la biennale. Tourner en rond en voiture pour chercher l'usine TASE au fin fond de Vaulx-en-Velin pour finalement y trouver une dizaine d'oeuvres, c'est peu cher payé le déplacement. 
A part ce petit bémol, les trois lieux principaux situés dans Lyon sont desservis par bateau et c'est vraiment une expérience agréable de naviguer sur le Rhône et la Saône en passant par la Confluence. 

Concernant l'exposition en elle-même, la biennale de cette année est foisonnante de découvertes. La commissaire Victoria Northoorn est argentine et a choisi beaucoup d'artistes d'Amérique latine dont certains ne sont pas encore connus. Il y a beaucoup de talents prometteurs. Elle a choisi comme titre " une terrible beauté est née" en référence à un vers d'un poème de Yeats qui s'appelle "Pâques 1916". Elle l'explique très bien elle-même :



Je vais donc essayer comme pour la biennale de Venise de faire une petite sélection des oeuvres les plus marquantes.