dimanche 2 septembre 2012

Il neige sur...septembre et la rentrée!

Comme vous avez pu le remarquer, le petit flocon que je suis n'a pas écrit depuis avril. J'en suis extrêmement confuse et j'espère que vous ne m'en tiendrez pas rigueur. Je travaille depuis janvier pour un magazine culturel en ligne intitulé Etre App'art (etreappart.wordpress.com), je vous invite à y jeter un oeil. Nous sommes une dizaine de colocataires dans un appartement qui essayons de rendre compte le plus fidèlement possible de l'actualité et des propositions culturelles à Paris et partout en France. Nous parlons d'expositions, de cinéma, de littérature ainsi que de certains classiques à voir et revoir. Pour être informés de tout ce qu'il peut se passer dans notre beau pays, je vous conseille fortement de consulter régulièrement ce blog !
Je vais essayer aujourd'hui de me faire pardonner de ces quelques mois d'absence en ramenant quelques perles vues cet été dans différentes manifestations d'art contemporain. Zoom sur de belles découvertes ou encore de belles confirmations ( si on peut dire cela comme ça) :

La Documenta est une quinquennale d'art contemporain très connue et très appréciée des amateurs des biennales. Créée en 1955 pour redonner de la vitalité à l'Allemagne après la guerre, elle est totalement indépendante du marché de l'art, ayant toujours le même budget depuis le départ. Un commissaire nommé à chaque édition est chargé avec son équipe de mener une réflexion sur le monde à travers les oeuvres. Les débats sont toujours nombreux et passionnants pendant les trois mois consacrés à la Documenta. Je m'y suis donc rendue cet été. Les expositions sont nombreuses dans toute la ville. Petit focus sur la Halle :

Etel Adnan :
Cette femme née à Beyrouth en 1925 est auteure, poète, dramaturge et artiste. Elle a été fortement marquée par la guerre civile libanaise et a quitté sa ville natale en 1949 pour rejoindre Paris et finalement s'installer en Californie en 1955. La peinture a toujours été un aspect important de son travail. Ce sont principalement des dessins et des toiles dans de petits formats. Elle peint des paysages abstraits avec des couleurs très vives qui suggèrent un paysage intérieur. Depuis les années 50, elle peint le mont Tamalpaïs, situé au nord de San Francisco. Comme Cézanne ou Hokusai, elle a  dessiné sous tous les angles cette montagne de 800m de haut. Elle a écrit des textes dessus, c'est devenu une véritable obsession. Les dessins qu'elle présente à la Documenta vont de la fin des années 50 à 2011. Ce sont des paysages très abstraits tracés à grands coups de brosse. Un rond, un carré... et un champ se dessine. Frappant!



Yan Lei

Pour la Documenta, l'artiste présente ce qu'il appelle son Limited Art Project. Dans une des salles de la Halle, sont présentées 360 peintures accrochées les unes à côté des autres sur les murs et dans des casiers que l'on peut tirer. Yan Lei a surfé sur internet et retenu toutes les images qui l'interpellaient. Il les a reproduites en peinture et installées ainsi. Il y en a une pour chaque jour de l'année chinoise mais son but n'est pas de présenter au spectateur, comme sur internet, des images à disposition. Chaque jour, un tableau sera recouvert d'une couleur et masqué. Il n'y aura donc plus rien à la fin de l'exposition, le processus de création est inversé. Son projet est limité. Une interrogation sur l'image à l'heure de la multiplication des médias!




Thomas Bayrle :

L'artiste présente plusieurs travaux touchant le monde actuel dans lequel nous vivons en cherchant à provoquer des questionnements. Il montre ainsi un gigantesque avion fait de toutes petites images de l'avion sur un mur ou encore une immense maquette de petites maisons et quartiers. Dans un coin de la salle, des moteurs tournent dans le vide. Quel regard portons-nous sur les technologies que nous avons créées qui améliorent la vie mais créent de nouveaux problèmes? Laissons parler l'artiste :



Voilà pour la Halle de Kassel. La Documenta a commencé en juin et dure encore jusqu'au 16 septembre. A venir encore quelques focus et quelques découvertes venant des Rencontres d'Arles.


mardi 17 avril 2012

Il neige sur...Resisting the present, Mexico 2000/2012


Jonathan Hernandez et Pablo Sigg, Fémur de elefante mexicano, 2010, os et peinture à l'huile, exposition Resisting the present, Mexico 2000/2012

Flocon n'a pas écrit pendant deux mois et demi et la raison en est qu'il était très occupé. Pas de repos pour les flocons! Une exposition l'a empêché d'écrire sur d'autres évènements. En effet, le Mexique est à l'honneur au Musée d'art moderne de la ville de Paris. Pays en situation difficile actuellement, une vingtaine d'artistes viennent montrer leur point de vue sur leur pays à travers les travaux qu'ils ont réalisés ces dix dernières années. Utilisant tous les médias ( vidéos, sculptures, installations principalement), les oeuvres sont poignantes et révèlent les différents problèmes qui freinent le Mexique dans son développement : le trafic de drogue omniprésent avec la puissance des cartels, les relations conflictuelles avec les Etats-Unis, la violence. Participant à un projet pour être médiateur lors de deux nocturnes de cette exposition, le flocon a pu rencontrer certains artistes lors du montage comme Arturo Hernandez Alcazar, Bayrol Jiménez, Jorge Mendez Blake, Alejandro Jodorowski et Marcela Armas ainsi que les deux commissaires. Petite sélection spécialement pour vous  :

Arturo Hernandez Alcazar, Papalotes negros (Ave de Mal Agüero), 2010, cerfs-volants couverts de pigment "noir de fumée", fils de coton noir, pierres :

Lors de la Révolution mexicaine, les chefs des révolutionnaires indiquaient les lieux de réunion en accrochant des cerfs-volants au haut des bâtiments. C'est d'ailleurs pour cela que, pendant longtemps, les enfants n'eurent plus le droit de jouer avec des cerfs-volants. L'artiste voulait jouer avec ce symbole. Ces cerfs-volants teintés de noir annoncent la mort et sont ici vus comme des oiseaux de mauvais augure. Les pierres auxquelles ils sont attachés sont issues de l'effondrement d'un immeuble il y a quelques années en face de l'atelier de l'artiste. Belle oeuvre qui introduit l'exposition !

Bayrol Jiménez, Maldito, 2012, acrylique sur papier :

Cette oeuvre créée in situ est impressionnante par sa netteté d'exécution et sa finesse. L'artiste a été aidé par des assistants. Il raconte ici en mêlant histoire vraie et mythologie le récit du narcotrafic, de son origine à maintenant. Le dessin déborde sur le sol pour traverser la salle. L'artiste aime que le spectateur puisse marcher sur ses travaux et participer.

Jorge Mendès Blake, El castillo, 2008, mur de briques et un exemplaire du livre Le Château de Kafka :

Ce mur barre la première salle de sorte que le spectateur doit le contourner. L'artiste voulait que ce soit un véritable obstacle. Il a construit le mur sur un classique : Le Château de Kafka. Dans ce roman, le héros K. qui vient d'arriver dans un village essaye de rentrer en contact avec les autorités du village pour officialiser son statut d'arpenteur. Le château dans lequel se trouvent les fonctionnaires demeure inaccessible pour lui et il ne peut jamais y pénétrer. Le château est ici littéralement symbolisé par ce mur qui écrase le roman. On voit aussi que ce petit livre est capable de modifier la structure du mur. Si l'artiste avait fait monter le mur plus haut, il se serait effondré. Le pouvoir de la littérature serait-il aussi fort que cela?


 Gonzalo Lebrija, Pequeno Lamento, 2008, sculpture en céramique :

Un petit personnage de 70 cm environ s'appuie contre le mur derrière le mur de briques de Blake. Il est complètement caché par el castillo et se trouve littéralement face à un mur. Ces deux artistes n'ont pas travaillé ensemble mais l'association est intéressante. Cet homme est dans une impasse. Reflet de la situation de crise actuelle?


Ilan Lieberman, Nino perdido, 2005-2009, 100 dessins, graphite sur papier, loupes :

L'artiste a reproduit à la main, au crayon, des photos d'enfants disparus ou enlevés qui sont publiées tous les jours dans le journal à Mexico. L'enlèvement d'enfants lié au trafic de drogue est un vrai fléau au Mexique. Ces photos d'enfant qui sont banalisées sortent ainsi de l'anonymat. L'artiste remet comme dans le journal leur prénom, le lieu de leur disparition ainsi que la date et leur signe de reconnaissance.


Nicolas Pereda, Entrevista con la Tierra, 2008, vidéo couleur HD, 18' :

Ce film a des images magnifiques. Il raconte l'histoire de la mort de l'ami de deux petits garçons qui a glissé lors d'une promenade dans les montagnes. Les deux garçons sont frères et le plus petit n'accepte pas la mort de son ami et ne la comprend pas. Un film émouvant!


Natalia Almada, El Velador, 2011, film couleur HD, 72' :

Avec des plans longs et des images très belles esthétiquement, l'artiste montre la vie du velador, c'est-à-dire le veilleur de nuit, le gardien du cimetière le plus célèbre au Mexique, qui contient les tombes des plus gros trafiquants de drogue. Situé dans la ville de Juarez, il est constitué de véritables mausolées, petites maisons avec plusieurs pièces, contenant les tombes des plus gros truands. Leurs épouses, parfois très jeunes (eux-mêmes peuvent parfois mourir jeunes), viennent nettoyer régulièrement la "maison" de leur mari défunt. Parfois, des règlements de compte entre cartels a lieu le soir. Le veilleur de nuit observe et entretient le cimetière, silencieux. Film paisible malgré son sujet qui embarque dans une atmosphère bien étrange!


Marcela Armas, I-machinarius, 2008, pétrole, chaîne industrielle, système de lubrification, moteur :

L'artiste dessine avec une chaîne métallique qui tourne autour de boulons les frontières du Mexique inversées contre le mur. Du pétrole brut coule ainsi du Sud vers le Nord du pays vu que les frontières sont inversées. Elle a voulu montrer l'importance de l'industrie du pétrole qui fait marcher le pays et qui est un produit acheté par les Etats-Unis notamment. Le pétrole coule donc vers le Nord et vers les Etats-Unis. Une oeuvre frappante que l'on voit de loin!

L'oeuvre la plus marquante est sans conteste El Sicario, Room 164, film qui date de 2010 et a reçu un prix à la Mostra de Venise de la même année. Réalisé par Gianfranco Rosi, il montre un ancien tueur à gages raconter sur un cahier sa formation et son travail pour un cartel. Il a choisi de parler de son ancienne vie (il a arrêté mais est recherché par ses anciens patrons) dans la chambre d'hôtel où il a réalisé plusieurs tortures. Visage caché et voix modifiée, il décrit platement toutes les méthodes qu'il a pu employer pour faire souffrir et tuer enfin ses victimes. Ce film est très dur et révèle beaucoup de choses sur la corruption du gouvernement mexicain et le fonctionnement des cartels dans le pays. Impressionnant!

http://www.arte.tv/fr/3413406,CmC=3410818.html  : ce lien montre une interview du réalisateur qui explique la trame de son film. Quelques extraits sont aussi montrés.

Je ne peux maintenant que vous conseiller d'aller voir l'exposition  pour voir toutes les autres oeuvres. Le 3 mai, de 18h à 22h, l'exposition est gratuite pour tous les étudiants sur présentation de leur carte. Des médiateurs seront là pour discuter avec tous ceux qui le souhaitent et expliquer les oeuvres vu qu'ils ont pu rencontrer des artistes. Qui sait? Peut-être que vous croiserez un flocon !


samedi 4 février 2012

Il neige sur...Ainsi soit-il!

Ainsi soit-il est le nom d'une exposition qui a eu lieu du 16 septembre 2011 au 2 janvier 2012 au Musée des Beaux-Arts de Lyon dans le cadre de la biennale d'art contemporain. Antoine de Galbert, ancien galeriste et fondateur de la Maison Rouge ( institut d'art contemporain) à Paris, a été invité à présenter des oeuvres de sa collection personnelle qu'il a accumulée depuis trente ans. Ces pièces ont été mises en regard avec la collection du musée.
Une très belle exposition foisonnante d'oeuvres remarquables. Petit aperçu :

Christian Boltanski, Le Coeur, 2005 :
Dans une salle noire, une lumière bat au rythme des battements d'un coeur dont le bruit sourd enveloppe la pièce. Boltanski est un plasticien français, né à Paris en 1944. Il a présenté une oeuvre dans la nef du Grand Palais à l'occasion de Monumenta en 2010 ( manifestation d'art contemporain) et il a représenté la France à la biennale de Venise de cette année. Les thèmes récurrents présents dans ses travaux sont la mémoire, l'absence, l'enfance et la mort. Né d'un père juif, son travail est imprégné de la mémoire de l'Holocauste.


Annette Messager, Coeur au repos, 2009 :
Belle image que ce coeur fatigué! Annette Messager est la femme de Boltanski et une plasticienne de renom. Ses oeuvres sont marquées par son histoire personnelle.

Chiharu Shiota, State of being n°24, 2009 :
Artiste japonaise née en 1972 à Osaka, son travail se caractérise par un mélange de performances et d'installations spectaculaires pour lesquelles elle utilise en les accumulant de vieux objets comme des chaussures, des valises, des châssis de fenêtres ou encore des lits. Une dimension onirique s'ajoute quand elle tisse de véritables toiles d'araignée noires autour d'habits d'un autre temps.

Les oeuvres de néons :


Jean-Michel Alberola, L'espérance à un fil, l'espérance a un fil, 2006-2009 :
Artiste algérien, il interroge l'idée de la "fin de la peinture", chère au XXe siècle. Ses sculptures en néon dessinent des parole ambigües entre prophéties, jeux de mots et slogans provocateurs. Il interroge le rapport du spectateur à l'oeuvre d'art et sa commercialisation.

Claude Lévêque, Vous allez tous mourir, 2001 :
Lévêque est un artiste plasticien assez incroyable. Dans chacune de ses expositions, il arrive à créer des ambiances mêlant presque toujours une phrase écrite au néon ainsi que de la musique et toute une mise en scène. Phrases drôles ou ironiques, ses oeuvres sont toujours marquantes.

Les séries de photographies :





Anders Petersen, série Mental hospital, 1995 :
Ce photographe suédois né en 1944 est connu pour avoir pris en photographie dès le début de sa carrière les personnes en marge de la société. Il fait cette série de photos dans un asile psychiatrique dans les années 90.

Luc Delahaye, Baghdad IV, 2003 :
Luc Delahaye a commencé sa carrière en tant que photojournaliste dans l'Agence Magnum et a travaillé pour des journaux comme Newsweek. Il continue aujourd'hui à prendre des photos d'actualité en grand format dans un style documentaire froid contré par une grande intensité dramatique.

Les vidéos :


David Claerbout, Reflecting sunset, vidéo 38", 2003 :
Vidéaste et photographe belge, ses oeuvres mélangent vidéos et photos, oeuvres en mouvement et images fixes. Sur cette vidéo extrêmement courte, le spectateur peut voir le reflet du soleil se déplacer sur la fenêtre dans la journée imperceptiblement.

Lucien Pélen, End, vidéo 36'45", 2009 :
Cette vidéo montre une silhouette sur une colline en train de creuser. Une tombe? Probablement vu qu'une photographie d'une tombe sur cette même colline est exposée dans la même salle du musée. Ce film est fascinant par le jeu d'ombres, la distance du spectateur face à cette colline. Le mystère reste intact. 


mercredi 1 février 2012

Les ovnis de la biennale!

Diego Bianchi, artiste argentin, présente The Ultimate Realities (réalisée en 2011) au deuxième étage du Musée d'Art contemporain. Nous sommes invités à entrer dans une salle envahie par des mannequins coupés en deux associés à des troncs d'arbres, des rouleaux de papier toilette qui côtoient des habits égarés. C'est un fouillis de choses sans nom, une forêt d'oeuvres dans l'oeuvre. L'artiste écrit un texte sur son travail, compliqué et qui ne m'a pas vraiment éclairé. Mais finalement, peu importe. Il faut se laisser porter dans ce dédale, ce labyrinthe d'objets que l'on doit contourner ou enjamber. C'est une atmosphère qui est créée là et c'est fascinant!




Judi Werthein, artiste argentine qui vit aujourd'hui aux Etats-Unis, présente une oeuvre tendre et touchante. Intitulée Cosa (chose), cette oeuvre est toujours à moitié cachée. Au deuxième étage du musée, elle ne laisse apparaître que deux pattes et un bout du corps. On devine un animal, un éléphant? On ne saura jamais. Les instructions de l'artiste sont claires : "Cosa est arrivée à Lyon après un voyage à travers le monde débuté en août 2009, avec des étapes à Stockholm, Banja Luka, Miami, Madrid, Mexico, Cologne et New York. Dans chacune des expositions, Cosa habite un espace en creux et ne se montre jamais complètement. L'oeuvre a été intentionnellement fabriquée en Chine ; la commande passée au téléphone était assortie d'une instruction très simple : que son poids ne dépasse pas celui du forfait maximum de FedEx."

Voilà quelques bouts de la bête et il semblerait en effet que ce soit...un éléphant!

Ici exposé à Madrid.

Le troisième ovni de la biennale s'intitule La Bruja 1 ( la sorcière). Cildo Meireles a conçu pour la première fois cette oeuvre à la biennale de São Paulo en 1981. Pour la biennale de Lyon, il investit tout le troisième  étage du musée avec 3000 kilomètres de fil noir attachés à un balai posé dans un coin. L'artiste en parle ainsi : "Le balai est ambigu : il peut être vu comme le début, la source d'une énorme expansion, ou peut-être le point final où tout se contracte et se compresse. Il y a aussi un paradoxe dans le fait qu'au lieu de nettoyer, le balai provoque un désordre chaotique."



La dernière oeuvre de cette biennale qui est marquante reste quand même Marienbad de Jorge Macchi. C'est une installation spécifique créée spécialement pour l'arrière-cour de l'usine de textile de Vaulx-en-Velin. Un jardin à la française reconstitué se retrouve au milieu de la zone industrielle de cette banlieue de Lyon et c'est extrêmement surprenant. Ce décor rappelle évidemment le célèbre jardin du film L'année dernière à Marienbad  d'Alain Resnais qui date de 1961. Juste magique!






Il neige sur...des vidéos surprenantes!

Tracey Rose est une artiste pleine de surprises. Elle présente plusieurs vidéos dans la cadre de la biennale de Lyon. La plus intéressante est sans conteste San Pedro IV qui date de 2005 et qui montre une performance qu'elle a réalisée à Jérusalem. Cette artiste sud-africaine se rend à Jérusalem pour se confronter à la situation politique dont le mur qui sépare Israël et la Palestine est un des symboles. Elle décrit son expérience ainsi : "Tôt le matin, les patrouilles sont moins nombreuses. J'ai donc peint mon corps et nous avons loué une voiture pour nous rendre jusqu'au mur au lever du jour." Une fois sur place, elle sort de la voiture et joue très mal l'hymne national israélien à la guitare électrique, nue et toute peinturlurée. Son action a pour but, dit-elle, " de faire de l'humour et de provoquer une réaction, histoire de pointer l'absurdité de la situation". Tracey Rose aurait pu avoir des problèmes avec cette performance mais même si on voit une sentinelle stationnée dans une guérite à l'arrière-plan, elle a pu partir sans être arrêtée. 
Une vidéo complètement folle !


Aurélien Froment est un artiste français qui vit aujourd'hui à Dublin. Il présente un film qui est assez captivant. Intitulé la tectonique des plaques (et créé spécialement pour la biennale), il met en scène la visite en plein air et à ciel ouvert d'une exposition grandeur nature. Un couple de jeunes gens se promène donc dans la nature en détaillant tout ce qu'ils voient et en regardant la moindre feuille d'herbe comme une oeuvre d'art. Les commentaires qu'ils se font l'un à l'autre sont ce que deux personnes se diraient devant des tableaux. C'est savoureux! 




Deux vidéos tout à fait captivantes!

vendredi 27 janvier 2012

Le dessin à l'honneur!

Deux artistes se distinguent par leurs dessins épatants.

Robbie Cornelissen, exposé au deuxième étage de la Sucrière, réalise des dessins à la mine de plomb mettant en scène une architecture fantasmée. Nous sommes confrontés à un univers urbain imaginaire et oppressant qui est tout entier issu de la subjectivité de l'artiste. Il dit lui-même que ses dessins sortent : "de mon propre esprit, ma propre mémoire et mon propre corps." Il intitule d'ailleurs son oeuvre Capacious memory c'est-à-dire "vaste mémoire". L'artiste rajoute : "Kafka est dans l'air ; ses histoires ont la même intention : celle d'inviter à se perdre dans le labyrinthe de la vie, entre les mondes intérieurs et extérieurs. Nous sommes enfermés. D'un autre côté, la perspective nous invite à entrer dans le dessin : entrez!"


The Capacious memory, 2011

Virginie Chihota est une artiste qui vit et travaille au Zimbabwe. Elle présente une série de dessins, créés spécialement pour la biennale, de petites poupées qui se font ballotter et malmener. C'est touchant et terrible à la fois. Pour elle, la poupée est source d'incapacités : l'incapacité de parler, de réagir, de frapper ou de retourner les coups si nécessaire. Universellement associée aux femmes, la poupée peut être vue comme le symbole de la capitulation, de la soumission - d'une situation sans issue. "Vous pouvez faire subir n'importe quoi à une poupée" explique l'artiste. 





Fruit of the dark womb, 2011.

Deux artistes qui créent leurs propres univers et nous aspirent dedans!

jeudi 26 janvier 2012

Le retour de la peinture...

On dit que la peinture est un genre qui a tendance à disparaître dans les biennales. On privilégie aujourd'hui les performances ou les installations. Les peintures ou les dessins sont moins présents. Heureusement pour nous, Victoria Northoorn aime beaucoup la peinture et s'intéresse particulièrement aux visions du monde que présentent ces artistes peintres.

Lynette Yiadom-Boakye, artiste britannique, présente une série de peintures qu'elle a conçue spécialement pour la biennale. Ses toiles de grand format s'étalent sur le mur de la première salle de la Sucrière. Ce sont principalement des portraits, individuels et collectifs, sur la plage ou autour d'une table. Parfois, ces personnages s'affirment dans des décors incertains, intemporels. Ses traits de pinceaux sont épais, brossant des silhouettes dont le contour n'est pas fini. Marquant!



Marlène Dumas est une artiste sud-africaine qui vit et travaille à Amsterdam. Elle présente des oeuvres à la fois à la Sucrière et au Musée d'art contemporain. Deux portraits sont accrochés au premier étage de la Sucrière. L'expression de la folie a toujours joué un rôle majeur dans l'oeuvre de l'artiste. Obsessive envy créé spécialement pour la biennale reprend La Monomane de l'envie de Géricault conservé au Musée des Beaux-Arts de Lyon. The Producer est un travail qui lui a été inspiré par Phil Spector, un producteur célèbre pour les nombreux titres pop qu'il a produits dans les années soixante et qui a été récemment condamné pour assassinat. Des portraits dérangeants!

La monomane de l'envie, Géricault, tableau conservé au Musée des Beaux-Arts de Lyon

                            The Producer, 2010.                                        Obsessive envy, 2011.

Enfin, Hannah Van Bart est une artiste qui vit et travaille à Amsterdam, elle aussi. Elle présente une série de portraits datant de 2010-2011. Elle explique : "Pour moi, représenter des visages, c'est dépeindre leur être au sein de leur paysage mental. [...] Je travaille jusqu'à ce qu'il y ait quelqu'un, quelqu'un qui se sente chez lui."

Un beau panorama de peintres !

Il neige sur...l'Amérique latine!


Puxador [Pilares], Laura Lima, 1998-2011

Laura Lima est une artiste brésilienne qui travaille à Rio de Janeiro. Elle recrée pour la biennale une oeuvre datant de 1998 qui a été jouée tout le long de l'exposition. Un homme nu tire des liens auxquels il est enchaîné comme s'il essayait de détruire l'architecture de la Sucrière. Les liens sont rattachés aux poteaux soutenant l'architecture et l'homme s'emploie quotidiennement à ébranler l'architecture de cette ancienne usine désaffectée. Ce travail s'inscrit dans un projet au long cours intitulé Men=flesh/ Women=flesh qui place le corps humain au centre de la pratique artistique.

El silencio de las sirenas ( le silence des sirènes), Eduardo Basualdo, 2011

Cet artiste argentin a créé cette oeuvre spécialement pour la biennale de Lyon. Régulièrement, un bassin se remplit d'une eau teintée de rouge. Quelques rochers sont disposés au milieu et il est possible pour les aventuriers de s'installer sur un rocher lors de l'écoulement de l'eau pour y rester lorsque l'eau viendra à nouveau remplir le bassin. Pendant quelques minutes, ces spectateurs audacieux resteront donc coincés sur leur rocher, guettant des sirènes ou des baleines ( il est doux de rêver). Aucune sirène à l'horizon, il n'y a que leur silence à entendre. Cette eau teintée de sang ne serait-elle donc pas un avertissement contre nos activités industrielles qui mettraient en danger la diversité sous-marine? Basualdo s'exprime ainsi sur son oeuvre : 

"Si la Lune s'écrasait contre la Terre, une véritable révolution gagnerait par les mers et les océans du monde. Expression maximale de la subversion des eaux. L'eau avancerait en un mouvement lent et imperceptible jusqu'à tout submerger. Docile sous l'influence des astres, elle cesserait d'être un élément domestiqué pour fixer de nouvelles règles au monde. Le territoire de l'eau concerne ce qui est bas, physique, ce qui est contraire au rationnel. Ici, se manifeste un changement de paradigme : l'ordre de l'esprit succombe sous un nouveau système, dont le centre est le corps tout entier. L'eau, douce, s'impose." 
Une oeuvre qui laisse rêveur ! 
 

mercredi 25 janvier 2012

Il neige sur...Michel Huisman

Cet artiste néerlandais présente trois oeuvres à la biennale, une dans chaque lieu. Ce sont toutes les trois des merveilles. Un univers sombre, ironique mais plein de tendresse s'ouvre à nous. Huisman dit lui-même qu'il est avide d'apprendre chaque jour de nouveau, en tentant de conserver l'état d'esprit qu'il avait à l'âge de sept ans. S'il devait inscrire son travail dans un mouvement d'histoire de l'art, il a longtemps hésité entre pré-apo-romantique ou post-apo-romantique. Il a opté pour apo-romantique.

Voici la première oeuvre présentée au sous-sol de la Sucrière. Elle s'appelle N°84 (document 2000 Hiroshima) et date de 2000. Ce petit animal bouge la tête de temps en temps. Il n'a plus de jambes et ses bras n'ont plus de chair. Le titre parle pour lui-même!

Cette série de charmants oiseaux posés sur des étagères s'intitule N°74 (Surrending Birds) et date de 1999. Malgré le sinistre de la situation, Huisman porte un regard doux sur ces oiseaux fatigués et désespérés.


Cette oeuvre intitulée N°64 (The Secret Garden) et datant de 1990 est un peu spéciale. Le visiteur doit lui-même faire l'expérience du jardin secret en mettant sa tête dans une boîte en carton. Et il y voit un petit oiseau qui chante sur une branche. C'est assez fou et très chouette à expérimenter!


La dernière expérimentation à faire pour le spectateur reste l'oeuvre que l'artiste ( présent sur la photo) a créée pour l'usine de Vaulx-en-Velin. Elle s'intitule N°84 ( Le Poisson) et c'est une création pour la biennale. Nous pouvons donc pénétrer, tel Gepetto, dans le ventre de cet énorme poisson pour vivre en autarcie pendant quelques minutes. Les murs, à l'intérieur, sont tapissés de miroirs et une boule disco pend au plafond. Une radio est allumée diffusant des chansons d'une autre époque. Le mobilier est seulement constitué d'un lit ainsi que d'une table et deux chaises. La radio est disposée sur la table et nous pouvons changer de fréquence si le coeur nous en dit. C'est un véritable univers créé pour survivre en cas de catastrophe écologique ou autre. En sortant, nous sommes rassurés de voir que le monde existe encore dehors !

Michel Huisman est une belle découverte de cette biennale!